Comment ne pas te
dire, Cher Amant, combien j'ai goûté
Ce délicieux instant,
tant et tant de fois espéré ?
Comment ne pas
t'avouer ce bonheur suprême,
Pris à découvrir ton
jardin d'Eden, et à y faire mon baptême ?
Sur ta couche intime,
abandonné à tes caresses,
Je me suis enivré de
tes senteurs musquées, avec hardiesse.
Point de fausse
pudeur, ni trop de mots, seulement des soupirs,
Pour ponctuer ce
moment de communion, et quérir le plaisir.
De cette coupe de
fruits défendus, je me suis rassasié,
Savourant à pleines
dents ce plaisir incommensurable d'y croquer.
Passer de l'un à
l'autre, les oublier, les reprendre, les retrouver,
Après les avoir
délaissés, tout entamer comme un gosse mal élevé.
Ne plus savoir où
donner de la tête devant tant de mets divins,
Avec voracité
m'acharner dessus de peur de connaître la faim.
Je me suis régalé,
oui, Cher Amant, j'en fais ici le digne aveu,
Sans me sentir
coupable ; ne pas y goûter eut été un désaveu.
Comment oublier le
rivage de tes lèvres, et l'ardeur par elles cachée ?
Comment ignorer ton
bois de senteur à la croisée de tes sentiers
Que je n'ai de cesse
de parcourir, de redécouvrir à l'infini ?
Comment résister à
tant d'objets de convoitise sans embrouillamini ?
De ton corps offert,
j'ai tout pris et pourtant, pourtant…
Il me semble, à mon
grand désarroi, ne pas avoir eu assez de temps.
J'aurais voulu à
loisir imprimer de mon sceau chaque parcelle
De ton corps, et
marquer au fer blanc irrémédiablement les séquelles
De mon passage où
j'espère avoir semé de délectables ravages.
Je rêve de ton corps,
de ces secrets, de revisiter ses terres sauvages.
Il me reste le chant
de tes plaintes inspirées par mes supplices.
Je lis encore tes
grimaces de bonheur par moi provoquées avec malice.
Si de toutes ces
turpitudes charnelles, de toutes ces tortures douceâtres,
Je suis par toi
blâmable, je me soumets volontiers à ta question opiniâtre.
Je peux bien brûler
en enfer, perdre mon âme, être privé d'oraison,
Je n'ai eu d'autres
excuses à ce pillage, que de vouloir te voir perdre la raison.
De tout mon cœur, de
toute mon âme, j'ai mis toute mon ardeur
A soudoyer tes sens,
et répandre dans tes veines cette infernale chaleur
Destinée à te faire
connaître les rives du nirvana, la béatitude du plaisir.
J'ai mis tout mon
être en quête pour ne point à ma mission faillir.
Je me suis régalé à
dévaster ta chair et me suis délecté de voir
Venir l'instant
suprême de ta jouissance dont j'aurais voulu boire
Sans fin le
lactescent sirop de corps d'homme gorgé de ta volupté.
Sur ton corps
contenté, j'aurais aimé laper chaque goutte étalée,
Et ne point laisser
perdre si précieuse et délectable marchandise.
N'y a t'il point de
honte à autant de gourmandise ?
De ton dard repu, la
dernière perle échappée me faisait déjà regretter
L'impatience de mon
transport et l'enthousiasme de mes caresses exercées.
Depuis cette débauche
des sens, je ne vis que dans la tenace appétence
De tes étreintes, de
tes baisers, et de, par toi, l'éveil me mes sens ;
Mon cher Amant,
j'espère subsister à la carence de nos étreintes…
Mon Amour, ne laisse
point la flamme qui brule en moi s'éteindre
Laisse-moi espérer
mon retour sur les rivages de tes désirs….
Mon Amour, reviens
pour faire de moi l'esclave attaché à ton plaisir.
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Le Galate mourant. Jardin du Château de Fontainebleau |
C.BAILLY
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01/09/2009