vendredi 4 juillet 2025

La Germaine

 

Elle vivait très chichement la Germaine,

Comme on disait, à la petite semaine.

De tous les jours, la couture était sa peine,

Toute sa vie, elle n'avait pas eu de veine.

Vieille dame - du net


Je la revois, devant la fenêtre, à profiter du jour,

Pour éclairer son ouvrage de couture en cours.

Elle reprisait mes chaussettes, mes pantalons

Que j'avais déchirés dans les buissons.



Elle n'appréciait pas du tout nos jeux de ballon.

C'est vrai, il finissait très souvent aux environs

De sa petite bicoque, son minuscule chez elle,

Où elle vivait chichement, sans faire de zèle.


Vieille dame - du net


C'est qu'elle n'avait pas toujours très bon caractère,

Avec elle, le destin avait été particulièrement austère,

N'ayant pas eu d'enfants, sa patience était limitée,

Nos jeux de galopins bousculaient sa tranquillité.



Une table, deux chaises, un crucifix au-dessus du lit,

Un poêle à bois, la richesse de toute sa vie.

Je la revois, assise sur le pas de sa porte, en tablier,

Les jours où elle n'avait pas de travail à la journée.


Femme reprisant un bas, Vincent Van Gogh


Car c'est ainsi qu'elle vivait tout le long de l'année,

Sa vie de vieille fille qui n'avait pas eu de fiancé.

Une vie de solitude, entrecoupée de la générosité

Des familles qui trouvaient toujours de quoi l'occuper.



Ces jours-là, elle était sûre d'avoir son assiette pleine,

Un repas, un peu d'argent, la rançon de sa peine.

Sa survie de tous les jours était à son âge, son seul espoir,

 Quand elle fermait les yeux au fond de son lit, le soir


Edouard Vuillard - La raccommodeuse



Il n'était pas rare que ma grand-mère me fasse porter

En peu de soupe à l'oignon, de pot-au-feu ou de potée,

Je la revois alors, venir m'embrasser de bon cœur,

Pour ce petit rien qui faisait du jour, son bonheur.


Je vous parle d'un temps que les moins de soixante ans

Ne peuvent pas connaître, je n'étais alors qu'un enfant.

Je vous parle d'un temps, où l'on usait jusqu'à la corde,

Mais cette époque est bien révolue, je vous l'accorde…




Christian Bailly

Tous droits réservés

04/07/2025

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